Writing and Translating the Intimate: Vital Signs, a work of digital literature about food by Geneviève Sicotte
Sherry Simon & Geneviève Sicotte
Summer
Summer
At the cottage I used to go raspberry picking. End of July, the hottest time.
There was an overgrown path, a U-shaped path, which led nowhere except back where you started. Here and there were some abandoned houses, half fallen-in. People had lived there. Who were they? Why were they gone?
In the gardens were remains of those former lives: apple trees, hostas, climbing rose bushes which had crushed the old fences with their weight and continued to flower. The rest had gone wild. In the ditches, along the road, against the houses, the raspberries had taken over.
The spiny stems were waist-high. You had to make your way into the dense bushes, and continue even further to where the best fruit had not yet been picked.
Sitting on the ground under the canopy of leaves, in the smell of ripe fruit — an acidic, sharp, sweet and woody odour that puckers the cheeks and brings a rush of saliva. The fingers, sticky and reddened by the juice, irritated by the thorns. Patient, inhabited silence, rustling of the grass, wasps buzzing against the skin.
In my plastic bucket, as I pick, the raspberries fall noiselessly, one at a time. The small mountain slowly grows. Strange July hourglass that stops the sun at its zenith.
Then comes the point when I must stop. The juicy mass, heavy, fills my bucket. Mixed in with the fruit, as if to recall their origin, leaves, bits of straw, insects, that I pick out carefully.
I give in. In my mouth, it’s more than a flavour: a state of being, a wash of aroma. I close my eyes. Behind my eyelids, the red, solar world. I belong to summer. The earth turns around me.
Été
Au chalet, j’allais cueillir des framboises. Fin juillet, au plus fort de la chaleur.
Il y avait un chemin tombé en friche, un chemin en U, qui ne menait qu’à revenir sur ses pas. Çà et là, quelques maisons inhabitées, à moitié effondrées. Des gens avaient vécu là. Qui étaient-ils ? Pourquoi étaient-ils partis ?
Dans les jardins, des vestiges de ces vies anciennes : des pommiers, des hostas, des rosiers grimpants dont le poids avait abattu les vieilles clôtures, et qui persistaient à fleurir. Le reste s’était ensauvagé. Dans les fossés, le long du chemin, contre les maisons, les framboisiers avaient conquis l’espace.
Les tiges épineuses montaient jusqu’à ma taille. Il fallait entrer dans les buissons compacts, les traverser pour aller plus loin, là où les plus beaux fruits n’auraient pas été cueillis.
Installée par terre sous la voûte des feuilles, dans l’odeur des baies mûres – une odeur acide, aiguë, sucrée et boisée, qui serre les joues et fait venir la salive. Les doigts poisseux et rougis par le jus, irrités par les piquants. Silence patient, habité, bruissement des herbes, bourdonnements de guêpes qui me frôlent.
Dans mon seau de plastique, à mesure que je grappille, les framboises tombent sans bruit, grain à grain. Elles forment un monticule qui croît doucement. Étrange sablier de juillet, qui immobilise le soleil au zénith.
Vient le moment où il faut que je m’arrête. La masse juteuse, lourde, emplit mon seau. Parmi les fruits, comme le rappel de leur origine, des feuilles, quelques brindilles, des insectes que je retire délicatement.
Je ne résiste pas. Dans ma bouche, plus qu’une saveur, c’est un état, un bain d’arôme. Je ferme les yeux. Derrière mes paupières, le monde rouge et solaire. J’appartiens à l’été. La Terre tourne tout autour de moi.