Five Poems by Michael Crummey
Jean-Marcel Morlat
Capelan roule
Ce qui, tel qu’on l’imagine, pourrait bien
ressembler à un orchestre en train de s’accorder,
cacophonie d’argent et de noir à vos pieds.
Capelans en frai échoués sur
des plages de sable par centaines
de milliers tels les survivants d’un naufrage,
leur panique furieuse se muant en
un tortillement impuissant à force d’épuisement
tandis que les garçons les ramassent
à l’aide d’épuisettes pour les mettre dans des seaux.
Ils migrent depuis
les Caraïbes pour ceci,
chaque vague roulant sur le rivage
comme un autre car bourré de
passagers destinés à l’oubli,
membres et têtes pendant imprudemment
aux vitres ouvertes.
La plupart pourrissait sur la plage
ou se retrouvait dans les jardins
de patates en ce temps-là,
sauf pour les quelques-uns que nous faisions sécher
sur des moustiquaires près de la remise,
nettes rangées de petits poissons
au-dessus desquelles les mouches bourdonnaient sans cesse
comme de folles croches sur une portée.
Nous les faisions griller au-dessus d’une flamme nue
jusqu’à ce qu’ils noircissent et qu’ils aient le goût
du poisson brûlé tel qu’on l’imagine
mais nous les mangions de toute façon
tête et queue ensemble.
Ils étaient venus de si loin
et s’étaient tellement abandonnés
et dans un silence si lourd
que nous nous sentions obligés
d’en acquérir le goût.
Capelin scull
What you’d imagine the sound of
an orchestra tuning up might look like,
cacophony of silver and black at your feet.
Spawning capelin washed onto
grey sand beaches in the hundreds
of thousands like survivors of a shipwreck,
their furious panic exhausted into
helpless writhing while boys scoop them
into buckets with dipnets.
They migrate all the way
from the Carribean for this,
each wave rolling onto the shore
like another bus stuffed with
passengers bound for oblivion,
limbs and heads hanging recklessly
through the open windows.
Most of them rotted on the beach
or found their way onto gardens
planted with potatoes in those days,
except for the few we dried on
window screens beside the shed,
neat rows of the tiny fish
endlessly buzzed over by houseflies
like crazy eighth notes on a staff.
Roasted them over open flame
until they were black and they tasted
much as you’d imagine burnt fish would
but we ate them anyway
head and tail together.
They had come such a long way
and given themselves up so completely
and in such an awful silence
that we felt obliged to acquire the taste.